Brouillon : La Joconde premier tableau Impressionniste ?

Définir l'Impressionnisme est une tâche ardue, notamment si l'on échappe à la seule sphère de la peinture, pourtant omniprésente, à la technique picturale transposée aux autres arts. Quel est le dénominateur commun à la peinture, la sculpture, la littérature, la musique impressionnistes ?
Le temps et sa fragmentation.
Celui de Bergson, et non celui de d'Aristote, des physiciens. Pour s'en approcher il faut confronter quelques textes. Les premiers sont hyper connus.... des spécialistes, des philosophes. Extraits du maître ouvrage de Bergson, L'Évolution Créatrice : “Notre durée (le flux continu du temps) n’est pas un instant qui remplace un instant ; il n’y aurait alors jamais que du présent, pas de prolongement du passé dans l’actuel, pas d’évolution, pas de durée concrète. La durée est le progrès continu du passé qui ronge l’avenir et qui gonfle en avançant. Du moment que le passé s’accroît sans cesse, indéfiniment aussi il se conserve.
Que dit Monet : “Impossible d'envoyer [à Durand-Ruel] une seule toile de Londres, parce que, pour le travail que je fais, il m’est indispensable de les avoir toutes sous les yeux... Je les mène toutes ensemble ou du moins un certain nombre.” En voyant les Cathédrales de Rouen chez Durand-Ruel, Pissarro avait bien perçu l’unicité esthétique de l’oeuvre. Les séparer c’était diviser le temps. Idem pour la série de Charing Cross, Waterloo Bridge ou le Parlement de Londres. Chacune des toiles se nourrit de l’autre l’effet passé produit l’effet à venir.
Cette approche contraire au scientisme conduit à une dualité entre l’intelligence, la science et l’intuition chez le philosophe : “La conscience, chez l'homme, est surtout intelligence. Elle aurait pu, elle aurait dû, semble-t-il, être aussi intuition. Intuition et intelligence représentent deux directions opposées du travail conscient : l'intuition marche dans le sens même de la vie, l'intelligence va en sens inverse, et se trouve ainsi tout naturellement réglée sur le mouvement de la matière. Une humanité complète et parfaite serait celle où ces deux formes de l'activité consciente atteindraient leur plein développement.” Que répond Monet :” Il est près de 7 heures, ma pauvre chérie, et ne puis t’écrire bien longuement, comme je le voudrais ; le même temps qu’hier, et toujours pas l’ombre de soleil, ni d’éclaircie, ce qui me gêne bien ; j’ai un tas de choses auxquelles je ne puis travailler ; cela me désole, parce que le temps marche et le soleil aussi, de sorte que le jour où il décidera à paraître, il ne sera plus à la même place. C’est surtout fâcheux pour mes toiles de l’hôpital (Le parlement de Londres). Je sens bien qu’il a déjà fait une grande course et qu’il ne se couche plus dans mon motif. Le peintre se fout de l’heure, physique, à laquelle le soleil se couche, il a l’intuition qu’il sera trop tard quand son pronostic météo s’avéra exact. Il y aura rupture. D'ailleurs il abandonnera ses effets pour d'autres. L’Impressionnisme, celui de Monet, de Bergson et de Proust, on y reviendra un jour, est un continuum se nourrissant des souvenirs, du passé. 
On pourrait en dire autant de la Joconde. Le tableau ne nous raconte plus une histoire, la “storia” chère à Alberti, et certainement pas celle d’une petite bourgeoise florentine. La nature du temps chez le Vinci est aussi un sujet d’études (cf Milan visites avec Léonard). Toutes ces pistes restent à développer, mais si vous vous rendez à l’Orangerie prenez cette approche comme viatique elle vous permettra peut-être d’aller au-delà des simples titres accolés aux panneaux et dîtes-moi. Si vous allez au Louvre ..... à suivre.

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