Multa Tuli
Existe-t-il une différence entre le Javanais opprimé d'hier et l'Indonésien exploité d'aujourd'hui ?
Multa Tuli, l'auteur utilise un pseudo latin voulant dire : Tant de Maux, nous amène à se poser la question d’une éventuelle évolution de la condition du peuple des Indes Orientales entre les 19e et 21e siècles.
Le Max Havelaar des temps anciens, dénonçant la condition des indigènes de Batavia cautionnerait-il la fondation pour le commerce équitable portant son nom ?
Le fair trade nous disculpe un tant soit peu, mais en voyant comment les balinais(es) d’aujourd’hui triment dans les rizières, sur les chantiers et les services aux touristes, on se pose encore et toujours la question d’une humanité de nos temps modernes.
Le roman d’hier ne semble plus intéressé grand monde. J’en veux pour début de preuve cette anecdote : sur la route secondaire entre Tegalallang et Tampaksiring il existe nombre de sculpteurs de Garudas et divinités hindouistes, effrayants pour la plupart car tel est leur rôle. Il existe aussi un endroit un peu fou, à l'image des temples de Chiang Rai, où la fantaisie d’un artiste s’exprime sans retenue. Là, un guide nous invite à prendre un café pour nous vendre sa prestation, prenant à témoin sa cliente du moment, une néerlandaise. Après quelques minutes de boniments, j'interroge la touriste sur le roman de son compatriote Eduard Douwes Dekker, notre Multa Tuli. Sa méconnaissance de l’auteur et de l’ouvrage me sidère, j’y vais un peu fort car 24 heures en arrière mon ignorance égalait la sienne.
Dénonciateur courageux d'un régime abominable s'appuyant sur une aristocratie javanaise, complice et coupable elle aussi de maltraitante à l'égard du peuple, l'écrivain fait preuve aussi d’audace dans la forme de son ouvrage en multipliant les inserts de toutes sortes.
S’il faut lire un bouquin après avoir vu Mange, Prie, Aime, ou Toute la beauté du monde, Tant de Maux s’impose, pour recadrer notre perception des choses de la vie. Entre toutes les traductions, celle disponible sur Gallica fait référence, pourquoi s'en priver ?
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